Le feu de paille capitaliste ou le leurre du pouvoir d'achat

Publié le par La Bile

C'est indéniable, la société capitaliste est en crise ! Annoncer son effondrement, malgré toute la satisfaction que j'en tirerai, ne serait qu'une manière de jouer au prophète, au prédicateur illuminé. Soyons néanmoins honnête avec nous mêmes, c'est un événement souhaitable. Cependant, un certain nombre de facteurs sont à interroger avant de spéculer sur notre histoire. 

Par essence, le capitalisme est un régime lié à l'exploitation de la force de travail de l'autre. Il permet, par ailleurs, la concentration des richesses et, surtout, des moyens de production. Cette concentration associée à une rationalisation du travail permet à son tour une meilleure rentabilité du travail ; donc une production de masse, en grandes quantités, à des prix défiant toute concurrence. D'aucuns diront que cette rentabilité du travail engendre ainsi un accroissement général des richesses et par conséquent du niveau de vie. Ils tenteront alors de vous vendre ce "capitalisme à visage humain" où une plus juste répartition de ces richesses permettrait à tous de s'installer à la grande table du banquet capitaliste. Ça c'est le mythe !

Passons sur l'évidence de l'empreinte écologique inhérente au mode de consommation des sociétés engagées dans un tel système et sur la cruelle nuance entre "tous" et "le plus grand nombre", figure rhétorique qui suggère en fait le nombre suffisant pour maintenir la paix sociale ; pour nous intéresser aux conséquences de cette logique de rentabilité et de concurrence.

Premièrement, la rentabilité, la baisse du coût de production des richesses est manifestement liée à la diminution de la valeur du travail. Par conséquent, l'idée que cette rentabilité du travail permettrait une hausse du pouvoir d'achat et donc du niveau de vie n'est qu'une illusion, un feu de paille qui n'aura chauffé notre société qu'un petit siècle. Deuxièmement, la notion de concurrence ne peut qu'accélérer les dérives liées à la recherche de compétitivité : exploitation d'une main-d'oeuvre bon marché, délocalisations, surproduction, etc. Le grand banquet prenant alors très vite la tournure d'une gigantesque soupe populaire !!! J'en veux pour preuve la multiplication des grandes surfaces hard discount.
 
Par ailleurs, une des idéologies les plus enracinées et, à mon sens, des plus nuisibles est celle qui tendrait à défendre notre pouvoir d'achat. Nous l'avons vu, le capitalisme n'est pas en mesure de nous garantir un pouvoir d'achat en hausse, ni même stable. Nous nous tournons alors vers la figure protectrice de l'état qui s'évertue à nous maintenir, contre le courant naturel de la mondialisation, au bon bout de la table. En effet, c'est la mondialisation qui permet aux sociétés occidentales d'entretenir le niveau de développement et de confort qu'elles connaissent. Il serait en effet bien vain de croire que notre pouvoir d'achat serait épargné si nous consommions des produits uniquement issus des pays occidentaux ou si les pays les plus pauvres appliquaient nos lois sur le travail. Nous devons alors prendre conscience que ce réflexe qui tend à vouloir préserver notre pouvoir d'achat est immédiatement la cause du maintien des inégalités sociales dans le monde.

Croire que le pouvoir d'achat est une source d'émancipation, de liberté, est également un funeste mirage. De quoi nous libère-t-il ? Du travail ? Allons, allons, il faut travailler plus pour gagner plus et consommer plus... Peut-être alors que le pouvoir d'achat nous confère le choix de consommer avec une certaine éthique, avec un certain engagement social et politique, être de "consomm-acteurs" ? Admettons, mais nous restons confronté au paradoxe qu'un réel "consomm-acteur" par son action lutte pour la propre baisse de son pouvoir d'achat et donc d'action. Citoyen-consommateur, voteriez vous pour la suppression du droit de vote ?   

Le seul vrai moyen d'échapper à cette spirale du capitalisme, qui ne s'effondre pas, mais se déplace (il profite toujours au plus compétitif, et notre tour est passé... place à la chine et consorts) c'est d'accepter un mal nécessaire, la baisse de notre pouvoir d'achat. Acceptons de payer le prix réel des choses, d'ajouter au café le prix de son transport et de son impact écologique. D'ajouter à chaque chose le prix des inégalités sociales. Tous ces avantages que nous tirons de la mondialisation et de l'exploitation de peuples vivants de l'autre côté de telle ou telle mer, acceptons de nous en passer ! Consommons moins mais consommons mieux. Consommer local, c'est investir dans du local. C'est en même temps faire du social et de l'écologique. C'est revaloriser le travail et donc améliorer le niveau de vie. Cela peut-être dur à admettre, d'autant plus dur pour ceux qui ont peu mais : Payer plus c'est peut-être vivre mieux. 

Nico

Publié dans économie

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